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En réponse à :

Soins palliatifs et pensée magique

, par Michel

Bonsoir, Romain.

Je comprends bien votre question : mon discours sur les fausses routes n’est-il pas un peu simpliste ?

Je ne crois pas. Car il est plus nuancé que vous ne pourriez le croire.

Voyons d’abord les dangers. Je ne dis pas qu’il n’y en a aucun. Mais les dangers sont de deux sortes :
- Ceux qu’on s’imagine ; et le principal fantasme du soignant est que le malade s’asphyxie. Là je suis formel : la quantité d’eau contenue dans une gorgée est bien incapable de noyer qui que ce soit. Il faut se souvenir que la capacité d’un poumon après expiration forcée est d’un bon litre et que le volume d’une gorgée est d’environ 20 ml.
- Ceux qui existent. Et tout corps étranger introduit dans une bronche peut toujours engendrer une infection. Simplement les liquides sont moins dangereux que les solides, et les liquides inertes moins que les autres. L’eau n’entraîne aucune autre conséquence que celles de sa présence physique. Si vous mettez du lait, du jus de fruits, vous allez introduire des liquides complexes qui engendreront des réactions physico-chimiques plus violentes, et le risque infectieux va augmenter.

Que faut-il donc faire ?

D’abord, il faut examiner. Et avant toute chose comprendre pourquoi la fausse route a eu lieu. L’immense majorité des fausses routes survient quand le malade n’est pas en bonne position (notamment quand il n’est pas assis sur une chaise) ou quand on ne le laisse pas se nourrir ou boire à son rythme. Il y a un examen médical de la déglutition. Et surtout il y a des tests, maintenant bien codifiés, qui permettent d’évaluer le risque.

Mais cette stratégie de bon sens n’est pratiquement jamais utilisée, et on saute tout de suite à l’étape suivante : modifier la texture de l’alimentation (ce qui n’a guère de sens dans le cas général) ou suspendre l’alimentation. Le danger alors, bien pire que celui des fausses routes, est la dénutrition. Ou alors on donne de l’eau gélifiée, sans voir que les quantités d’eau gélifiée nécessaires pour hydrater un malade sont hors d’atteinte, et que si l’eau gélifiée évite 90% des fausses routes les 10% qui restent conduisent à mettre dans une bronche de la gélatine, qui est dans cette occurrence l’un des pires allergènes qui soient.

C’est pourquoi je plaide pour une attitude de bon sens :
- Constater la fausse route.
- Évaluer la déglutition.
- Chaque fois que c’est possible, mettre en place des mesures correctives.
- Supprimer toutes les boissons sauf l’eau.
- Ne modifier l’alimentation que quand c’est indispensable.
- Réévaluer la situation périodiquement.

Bien à vous,

M.C.

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