Poster un message

En réponse à :

La méthode Gineste-Marescotti

, par Michel

il y a 2 minutes Administrateur Michel 73 articles

Bonsoir, Gisèle.

"J’ai 58 ans. Je suis aide soignante. Je tiens à vous dire que la notion de souffrance du soignant, je l’ai connue. J’ai été également "cataloguée" et remise à ma place parce que je "mettais le doigt" sur le non respect de la personne âgée et sur ce qui selon moi était de la maltraitance."

Et je n’ai certes pas besoin que vous m’en disiez davantage : ce dont vous témoignez, c’est tellement fréquent, tellement quotidien ! Il ne fait pas bon questionner les pratiques établies, surtout quand l’équipe, flairant qu’elle n’est pas, peut-être, aussi bien qu’elle le dit, se crispe dès qu’on détonne un tout petit peu.

"La main qui caresse, les mots doux à l’oreille, les sourires et les regards complices, je les ai toujours naturellement donnés, spontanément sans même y penser. Quand on travaille avec un cœur sous la blouse, comment ne pas donner l’amour qui va avec ? J’ai pourtant travaillé dans certains établissements où la notion d "affect" était proscrite et où il fallait aimer en cachette."

Vous savez, cette question est très difficile. Au vrai elle n’a pas de solution ; et je reste très réticent devant celle proposée par Yves.

Il y a une première chose qui est certaine : on a enseigné dans les instituts de formation que le bon soignant est celui qui n’a pas d’affects. Pour accomplir un bon geste technique, il faut ne pas trembler, il faut ne rien ressentir. Cet idéal du "soignant blindé" est une ânerie monumentale, basée sur des fantasmes absurdes : comme si l’affectif allait perturber le technique !

D’ailleurs les choses ne se passent nullement ainsi. Je parle d’expérience : je déteste la chirurgie, mais quand c’est nécessaire je manie le bistouri et les aiguilles pas plus mal qu’un autre ; je me souviens d’avoir été en stage en chirurgie de la face : entre les accidents, les tumeurs et le coups de fusil, le spectacle était assez difficile à supporter ; mais du moment que j’étais au travail, rien ne me faisait peur. Pourtant après quarante ans de métier j’ai toujours un peu de difficulté à regarder faire une piqûre. Si c’est moi qui fais le geste, je fais tout ce qu’on veut. Mais si je regarde un autre...

Ceci pour vous dire que même dans ce que notre métier a de plus technique l’affectif ne joue pas comme on l’imagine.

Seulement, voilà. Les psychologues, et plus encore les psychanalystes, nous ont appris depuis longtemps que l’affectivité est dangereuse. Dangereuse pour celui qui la reçoit, dangereuse pour celui qui la donne. Avec une affectivité débridée on fait de superbes catastrophes. Et Yves a grand tort de croire que cela ne pose pas problème.

Je crois comme lui que le soignant est un professionnel, ce qui veut dire qu’il emploie des outils. Comme le dit Yves, son affectivité est un outil, un outil qui lui sert à soigner mais aussi à percevoir. Autant dire qu’il n’est pas question de la nier ou de la mettre de côté.

Mais comme il est un professionnel, le soignant ne doit utiliser que des outils qu’il maîtrise. Or l’affectivité, ce n’est pas quelque chose qui se maîtrise.

Et c’est pourquoi je dis que le problème est difficile.

Car le soignant doit absolument garder le contrôle de la situation ; cela veut dire (et là je m’oppose totalement à ce qui est dit dans la "métho") garder une distance thérapeutique ; lorsqu’il laisse parler son affectivité il doit à tout moment pouvoir en rendre compte, ce qui veut dire que sa spontanéité a toujours des élastiques : il doit toujours, disons, se regarder en train de ressentir.

Et ça, c’est très difficile ; les psychanalystes mettent des années à l’apprendre. Et si on ne prend pas ces précautions, alors on va griller des malades et des soignants. Les risques d’un mauvais usage de la "métho" sont réels.

"Je viens de voir ce reportage à la télé. J’aurais tant aimé rencontrer Yves Gineste. J’espère que sa méthodologie sera largement promulguée et mise en pratique pour le bien être des personnes âgées et des soignants qui les prennent en charge chaque jour et chaque nuit."

Et je milite moi aussi pour cela. A condition de ne pas oublier le début de votre intervention : en fait, tout ça, vous le saviez déjà, n’est-ce pas ? Ce qui manque, ce n’est pas le concept, c’est la précision de sa mise en pratique. C’est tout ; et c’est énorme.

Bien à vous,

M.C.

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.