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L’agonie

Bonjour Docteur,

J’ai découvert votre site en cherchant des informations sur comment se passe un décès : tout d’abord, merci de votre honnêteté, de votre bienveillance et de votre écoute.
Vous soulagez de nombreuses personnes vivant des situations de détresse, et je ne peux qu’admirer cela.
Etant médecin, vous arriverez peut-être à répondre à mes questions : j’ai perdu ma mère en novembre dernier, de manière brutale et excessivement rapide.
En effet, elle souffrait de désaturation respiratoire, et son médecin a imposé son hospitalisation mi-octobre. Selon ses dires, elle aurai pu mourir la semaine suivante si rien n’avait été fait.
Elle a donc été hospitalisée durant les 2 semaines précédent sa mort, avec 2-3 séjours en soin intensifs pour difficultés respiratoires.
L’équipe médicale a décidé de lui posé une sonde urinaire, car elle faisait de la rétention d’eau et ont remarqué que ses reins fonctionnaient mal : apparemment, cela est lié aussi à sa désaturation en oxygène, car le cœur pompe mal le sang.
A ce stade, je me demande si ce signe n’aurait pas du être une alerte, qui aurait pu m’aider à anticiper la suite.
Ayant toujours eu des difficultés respiratoires, on a tout d’abord essayer de la soigner à coup d’antibiotiques et de cortisone : rien n’a fait effet.
Les médecins ont donc fait des examens approfondis, qui ont mis en lumière un cancer du poumon en stade avancé, avec un début de métastase dans le foie.
On me l’a annoncé le mercredi 9 novembre : en questionnant son médecin, ce dernier m’avait parlé d’un "délai" de quelques mois, chose que je pouvais plus ou moins gérer.
En la quittant le soir même, puisqu’il faut bien rentrer à la maison : elle m’a dit "c’est quelque chose dont on doit penser, la mort", et je lui ai répondu que ce n’était pas pour tout de suite.
Que l’on soit bien d’accord : de part son état de santé fragile(elle souffrait d’arthrite,d’arthrose et de plusieurs hernies discales ou encore de problèmes de tension), je n’avais aucuns espoirs de la sauver : on ne sauve pas les gens dans cette situation.
Néanmoins, j’aurai aimé avoir plus de temps.

J’ai eu un appel de l’hôpital aux environs de 3h du matin, la nuit du 9 au 10 novembre, que je n’ai pas entendu : j’ai rappelé à mon lever du lit.
On m’a alors indiqué qu’elle avait encore eu un épisode de détresse durant la nuit, et qu’elle a fini par refuser l’aide respiratoire.
On me parlait de mois, c’était devenu une question d’heure.
Elle nous a quitté le 10novembre à 8h30 du matin.

A la suite de votre article, je pense qu’elle avait des symptômes d’agonie, mais pour moi cela a duré plus de quelques jours, au moins 2 semaines : mais apparemment cela ne dure pas aussi longtemps.
Elle avait de grandes difficultés respiratoires, elle ne pouvait quasiment plus se déplacer (et je pense que cela dépassait les douleurs qu’elle avait au quotidien), même aller aux Wcs étaient devenu impossible.
Elle avait également constamment les jambes gonflées, et s’ endormait de plus en plus souvent.
Ayant toujours été une femme active, aurai-je du avec ces signes anticiper son décès ? Aurai-je pu d’ailleurs ?
je me pose ces questions, car même pas son médecin traitant n’a pu voir son cancer : est-ce lié au fait de ses problèmes respiratoires de base ? Est-il incompétent ?
Comment pouvais-je, et pouvait-il voir le cancer ?
Ayant chercher des informations sur le cancer du poumon, j’ai lu qu’une des 2 formes était particulièrement brutale et agressive, et qu’elle ne laissait pour ainsi dire aucunes chances de survie :
Y aurait-il eu des signes, qui m’aurai permis, non pas de la soigner mais de rendre ses derniers moments plus confortable ? Elle a souffert durant des mois, et trop souvent je me demande si j’aurai du la placer moi-même en maison de soin, ou à l’hôpital. Mais cela pose une question éthique, puisqu’elle avait toute sa tête : comment peut-on forcer une mère à se faire hospitaliser ? Elle avait 63ans, donc jeune : mais je me sens coupable de ne pas avoir pris cette décision, qui aurai pu vraiment faciliter ses derniers mois de vie.

Une autre question, et celle-ci ne me quitte pas : sur le rapport de décès, l’équipe médicale a noté que ses fonctions rénales avaient cessé de fonctionner ; ce qui a probablement provoqué la mort.
Comment se déroule un décès suite à une insuffisance rénale ? On m’a expliqué que le patient s’endors paisiblement, mais j’aimerai en savoir plus, au niveau plus technique, plus médicale.
Est-cela qu’il l’a tué ? Est-ce le cancer ?
D’un point de vue médicale, j’aimerai savoir comment cela se passe : surtout si cela a été difficile, et douloureux.
Lorsqu’elle a refusé les soins, on m’a certifié qu’elle était tout à fait lucide (sinon ils auraient refusés) : comment se passe la phase de décision chez un patient ?
Dans votre pratique, qu’avez-vous observé ? Je sais que cette situation est propre à chaque patient, mais j’aurai aimé savoir si cette décision provoque de la tristesse, de l’angoisse, de la peur, de la sérénité...
Je n’ étais pas présente à ce moment, et j’aimerai pouvoir imaginer dans quel état on peut se trouver lorsqu’on prend cette décision.
Je ne dirais pas que j’ai besoin de comprendre, mais j’aimerai avoir des exemples concrets, afin d’arrêter de m’imaginer tout et n’importe quoi.
Elle est décédée moins de 24h après m’avoir annoncé son cancer ; de part son état physique et d’autre part son épuisement, je pense qu’elle en a eu assez, et son corps aussi. Je respecte tout à fait cela :
qui sommes-nous pour choisir de la vie ou de la mort des gens autour de nous ? Je pense que chacun, s’il peut, doit avoir le choix de choisir sa mort, sans être culpabilisé par son entourage.

Comment cela est possible de mourir aussi vite d’un cancer ? Celui du poumon va-t-il vraiment aussi vite ?

J’ai lu dans un de vos commentaires, que certains "ressentent" l’arrivée de la mort chez leur proche : je pense que cela est vrai. En tout cas, l’inconscient peut préparer le corps et le cœur à "limiter" le choc.
Durant les semaines précédents sa mort, j’avais dit à mon compagnon que j’avais l’impression de partir à la guerre tout les matins, et je pense que c’est mon inconscient qui m’a préparé à affronter cette épreuve.
Je pense que dans ces moments, il est important de faire confiance à son instinct, et aux signes que notre corps nous envois : cela permet d’éviter une véritable catastrophe à ceux qui restent.

J’ai conscience de la longueur de mon message, et m’en excuse par avance : cela fait des semaines que je me pose toutes ces questions, et je n’ai personne qui puisse me répondre.

Merci d’avance pour votre réponse et en générale votre bienveillance : cela fait du bien de pouvoir avoir un médecin qui nous parle sans détour.
Gardez cette précieuse qualité et chérissez-la : vous faites énormément de bien à vos lecteurs.

Avec mes meilleures salutations.
Sandrine A.

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