Gériatrie, soins palliatifs - Michel Cavey

Pratiquer la médecine gériatrique, c’est se confronter tous les jours avec des humains qui vivent leurs derniers temps. On ne peut pas faire ce métier sans se questionner, non seulement sur la mort mais plus largement sur le sens même de l’existence.
Que valent ces réflexions ? Je ne sais pas. En voici quelques-unes, juste pour les partager.

Actualités

  • Démence et dignité

    Le Président de la République a déclaré en substance le vendredi 12 septembre qu’il importait de "rendre leur dignité aux malades atteints d’Alzheimer".

    J’espère avoir le temps de développer ce sujet, mais il faut réagir en urgence.

    Sans doute s’agissait-il pour le Président de montrer sa sollicitude envers ces malades.

    Mais il y a un inconvénient : c’est que la dignité est inhérente à la condition même de l’être humain. C’est cette seule conviction qui a motivé la lutte contre tous les totalitarismes. Quand on parle de "rendre sa dignité" à quelqu’un, on insinue qu’il l’avait perdue.

    On ne saurait être plus méprisant. On ne saurait être plus méprisable.

  • Un plan pour le développement de la bientraitance

    Le Secrétariat aux Personnes âgées a présenté en mars dernier un "plan de développement de la bientraitance et de reforcement de la lutte contre la maltraitance".

    Il faut lire ce document, non seulement parce qu’il contient des idées intéressantes, mais aussi parce que tout ce qui permet d’améliorer les conditions de vie des personnes âgées mérite d’être soutenu et encouragé.

    Mais je continue à rester perplexe devant le concept de "bientraitance", dont je me demande s’il va au-delà d’un jeu de mots creux.

    Il y a un paradoxe : tout le monde sait intuitivement ce qu’est la maltraitance. Mais quiconque essaie de définir ce que c’est ne tarde pas à s’y casser les dents. Compte tenu de ce que nous faisons subir aux personnes âgées, c’est de peu d’importance : il y a tant à faire qu’on n’est pas près de se trouver gêné par ces imprécisions. Par contre les choses deviennent cruciales dès qu’on se trouve en présence de situations limite. Et si la maltraitance est si indéfinissable, comment compte-t-on définir la bientraitance ?

    Voir en ligne : Plan de développement de la bientraitance

  • Le verdict de Périgueux

    Le docteur Tramois a été condamnée à un an de prison avec sursis.

    Je remarque tout d’abord que ce verdict confirme ce que j’ai déjà écrit : il n’y a aucun exemple de professionnel de santé condamné en France à une peine effective pour un fait d’euthanasie simple. La fameuse nécessité de sécuriser l’activité des médecins, dont on nous rebat les oreilles, est une affabulation pure et simple.

    Mais je remarque aussi que ce verdict est le plus sévère jamais prononcé depuis trente ans.
    - J’ai déjà dit, mais je le redis encore, que le docteur Tramois mérite le soutien et l’estime de tous. Nous devons faire ce que nous pouvons pour partager un peu de la peine qui doit être la sienne ce soir.
    - Mais il ne fait pour moi aucun doute que la justice n’aurait pas éprouvé le besoin de rappeler le droit si l’affaire n’avait pas été à ce point médiatisée. Ce que le docteur Tramois paie, ce n’est pas un geste de désarroi effectué il y a trois ans et qui, ne méritant qu’un rappel aux bonnes pratiques palliatives, n’aurait jamais dû la conduire aux Assises ; non, ce qu’elle paie c’est d’avoir été conseillée n’importe comment. Les partisans de l’euthanasie l’ont ainsi envoyée au massacre sans le moindre égard pour les risques qu’ils lui faisaient prendre. Ils n’ont pas eu davantage le souci des protagonistes de l’affaire de Mantes-la-Jolie : que sont devenus les soignants du service de pneumologie ? Qu’est devenue Chrisitne Malèvre ? Ils n’ont pas eu davantage le souci des protagonistes de l’affaire de Berck : Marie Humbert a dit comment elle avait été manipulée par l’ADMD ; on ne se demande pas comment vivent les soignants qui entouraient Vincent Humbert.

    Ce soir, j’ai la rage. Mais pas parce que le jury a condamné le docteur Tramois. J’ai la rage parce que des gens qui se targuent d’agir par générosité, par altruisme, par amour de l’humanité, n’ont pas hésité à la sacrifier comme un vulgaire pion sur un échiquier. Les gens qui ont fait cela n’ont pas de coeur.

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