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En réponse à :

L’escarre : le soin

, par Michel

Bonsoir, Aline.

Ce qui ressort de votre message, c’est surtout une grande détresse, qui me semble provenir d’un malentendu : la question centrale est de savoir quelle idée on se fait de l’état de votre mari, du pronostic de sa ou ses affections, et donc de ce qu’il convient réellement de faire. Il y a visiblement un problème de communication, et des explications qui ne vous ont pas été données.

Dans ce cas vous ne devez pas oublier que ces explications vous sont dues. Et si vous êtes en conflit avec l’équipe soignante, il est nécessaire de le trancher. Et la première question serait d’avoir l’opinion de votre mari. Qu’en dit-il lui-même ? Car s’il est capable de dire quelque chose sur la situation, alors ce qu’il dit et désire s’impose à tout le monde.

Ce préalable est important, car tout mon problème ensuite est de savoir si et dans quelle mesure cette difficulté de communication avec l’équipe pèse sur l’idée que vous vous faites de la situation. Cependant je vais essayer de vous répondre point par point.

La question de l’escarre tout d’abord. Si on pense que l’escarre peut guérir (parce que l’état général du malade est bon, parce qu’il recommence à marcher, parce qu’on n’a pas de souci nutritionnel), alors il faut être très agressif, et bien sûr il faut enlever la nécrose. Et le plus efficace est de la retirer au bistouri, ou s’il le faut au cours d’une intervention chirurgicale en règle. Cela suppose des soins très techniques, une très bonne prise en charge de la douleur, bref, cela ne se fait guère en dehors des services très spécialisés.

Mais si on pense que l’escarre de toute manière ne guérira pas, alors il faut laisser la nécrose en place : l’enlever ne servirait à rien, et on imposerait au malade des douleurs inutiles.

Après, le problème des escarres talonnières est qu’il est très difficile de trouver un pansement correct : les pansements d’escarre ne doivent pas être recouverts pas un autre pansement, sinon ils perdent une bonne part de leur efficacité ; mais si on ne les recouvre pas ils ne tiennent pas. Il faut donc se lancer dans des bricolages plus ou moins compliqués pour concilier ces deux impératifs opposés. En tout cas laisser des escarres frotter sur des draps est évidemment une solution de désespoir, qu’on peut accepter si on a essayé tout le reste, et uniquement dans un contexte assumé de soins palliatifs.

Naturellement il y a la question des bactéries ; et si on laisse une escarre frotter sur les draps, le risque d’infection est augmenté. Mais je ne suis pas certain que ce soit là le problème essentiel : si on n’arrive pas à mettre un pansement correct (et il peut se faire que ce soit impossible), alors l’évolution de l’escarre sera très mauvaise, et le risque infectieux ne représentera qu’une petite partie des ennuis.

Je me demande s’il ne s’est pas passé autre chose.

Les soignants ont mis un pansement. Mais, comme je vous l’ai dit, cela n’a pas tenu ; alors vous avez vu votre mari sans pansement ; cela ne veut pas dire que les soignants n’en avaient pas mis un. Et le lendemain ils ont adopté un pansement plus solide.

La question de la rééducation est encore plus difficile. Ce que les médecins vous disent c’est qu’ils ne croient pas que votre mari puisse bénéficier d’une rééducation, soit parce qu’il est atteint d’une maladie trop sérieuse, soit parce qu’il est actuellement trop faible. Il arrive très souvent que l’entourage du malade se fasse des illusions sur ses possibilités de rééducation. Mais il peut arriver aussi que les médecins sous-estiment les capacités du malade.

Ce qui m’inquiète c’est que pour avoir des escarres talonnières stade IV il faut que votre mari soit dans un état général assez mauvais, ce qui rend sceptique sur son aptitude à remarcher. La question que j’aimerais vous poser là est de savoir si on a fait un bilan gériatrique approfondi. En tout cas les réponses qu’on vous a faites sont absurdes : le fait de le remuer tous les matins qui va lui servir de kiné, et il n’y a pas que dans le sud qu’on rééduque les gens. Il faut donc qu’on vous dise clairement qu’on a fait une évaluation de ses possibilités motrices et qu’on a conclu qu’il ne tirerait aucun bénéfice d’une rééducation : malheureusement cela se produit souvent.

La question de la subocclusion est moins grave, car ce sont des choses qui se règlent assez facilement. Mais ce que vous racontez témoigne d’une grave dégradation de vos relations avec l’équipe, et cela est toujours très difficile à vivre pour tout le monde.

C’est pourquoi il me semble qu’il faudrait d’abord assainir cette relation. Il y a des malentendus, des méfiances de part et d’autre, c’est inconfortable et dangereux. Normalement il y a un médecin conciliateur dans l’hôpital, il faudrait aller le voir, qu’il vous aide à rencontrer l’équipe soignante dans une autre position ; et qu’on vous explique mieux pourquoi la stratégie est ce qu’elle est.

Mais il n’est guère possible de vous en dire plus, car d’un côté vous avez raison de vous demander si votre mari bénéficie de tous les soins auxquels il peut prétendre, soit que l’équipe fasse preuve de négligence (on sait bien que cela se produit), soit qu’elle fasse une erreur d’analyse (cela se produit aussi) ; d’un autre côté il est très possible que l’état de votre mari soit pire que vous ne pensez, et que l’équipe ait raison de ne pas adopter une attitude inutilement agressive.

C’est pourquoi il me semble indispensable de recourir à un arbitre.

Merci de me donner de vos nouvelles.

Bien à vous,

M.C.

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