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L’agonie

, par bou

Je voudrais vous remercier pour ce texte.
Mn pèere a 87 ans et souffre d’insuffisance cardiaque grave. Depuis décembre, il a été hospitalisé 3 fois pour oedème pulmonaire aigu. Cette fois-ci est la troisième. Les deux premières fois, il était en cardio et les médecins n’étaient pas inquiet, ils lui "séchaient les poumons" et le renvoyaient chez lui. Je n’ai pas su apprécier la gravité de la situation. J’ai demandé, plein de fois, les réponses étaient toujours un peu vagues. Je voulais qu’il change de cardiologue en ville et j’aurais voulu pouvoir l’accompagner pour comprendre. Il n’a jamais voulu. Il n’avait pas envie. Il me disait qu’il allait y réfléchir mais je le connais, cela voulait dire non.
Cette fois ci, il est arrivé lundi en cardio. Transféré mardi en réamed pour pleurésie, je luiai parlé au téléphone et tout avait l’air d’aller. Le médecin (incroyablement humain) nous a appelés le soir vers 21h pour nous dire que c’était très grave même s’il avait l’air de bien aller et que si on le souhaitait, on pouvait passer le voir pour avoir l’occasion de discuter un peu avec lui. On l’a quitté vers minuit et ça avait encore l’air d’aller, même si il était sous oxygène. Mais il l’étaità chaque fois et se remettait à chaque fois.
On nous a rappelés à 2h du matin pour nous dire que c’était la fin. On y est allés, le médecin nous a accueillis et nous a expliqué qu’il avait une insuffisance rénale très grave, qu’il avait beaucoup de mal à respirer, etque si la situation empirait il ne l’intuberait pas et ne le dialyserait pas parce que mon père ne le souhaitait pas et qu’il était d’accord avec sa décision, qu’on ne pourrait plus l’extuber et que ses reins payeraient trop cher la dialyse. Il nous adit qu’il ne souffrirait pas, ils lui donneraient des médicaments pour l’aider à s’endormir.
J’ai l’impression d’avoir perdu 50 points de QI, j’ai demandé bêtement "il va mourir ?"
Le médecin m’a répondu une phrase de médecin assez vague. Je me suis rappelé que les médecins disaient la vérité à ceux qui voulaient et pouvaient l’entendre. Par ailleurs, cela fait 4 ans que j’ai été très malade avec un Basedow dont j’ai failli mourir, etla situation n’est pas encore stabilisée pour moi. Je suis donc habituée à recevoir des mauvaises nouvelles dans la mesure du possible (c’est à dire que j’ai dépassé la phase où on est en colère, où on se dit"ce n’est pas possible" etc, je prends la nouvelle et vois comment on peut faire avec).
J4ai donc reprécisé ma demande, j’ai dit au médecin "compte tenu de votre expérience, qu’en pensez vous ?" il m’a répondu "vous voulez connaître mon avis et que je vous dise la vérité ?3 je lui ai répondu "oui".

Alors il m’a dit (vraiment très humainement) que c’étaitla fin. Qu’il n’allait pas se remettre de sa pleurésie, mais que parfois des patients l’étonnaient ; mais enfinque s’il réussissait à s’en tirer, il ne quitterait pas l’hôpital, et qu’il valait mieux en fait que mon père meure dans son service où ils avaient fait connaissance (ceformidable réanimateur prend le temps de faire connaissance avec ses patients dans la mesure du possible) et où il serait confortable plutôt que seul chez lui (mon père est très indépendant) ou seul dans un service de cardiopendant que l’infirmière serait à l’autre bout du couloir débordée par 11patients.
Il a dit que lorsque l’on intubait, ou dialysait, il devait y avoir un objectif derrière et qu’avec mon père, il n’y avait pas d’objectif comptetenu de son état, de ses résultats d’examens et de son echographie cardiaque. SOn coeur ne se contracte plus assez.

On a passé la nuit.Mon père est toujours avec nous.
Je ne sais pas quoi faire pour faire tout au mieux pour lui. J’ai peur de ne pas pouvoir. Je manque de force physique. Nous sommes allés le voir ce matin vers 11h. Je n’ai pas pu y aller plus tôt, je fatigue vite et après la nuit passéela-bas, jen’en pouvais plus. Mon mari, ma soeur et son mari ont pu faire une sieste mais pasmoi:je prends des corticoides et si je fais une sieste je ne peux lus dormir la nuit. Bref je n’ai pas pu y être dès8h.
On m’a dit qu’il avait été très angoissé et qu’il avait demandé des anxiolytiques qu’on lui passait. Jem’en suis voulu dene pas être là plus tôt mais je ne pouvais vraiment pas, déjà pour y aller j’avais du mal à marcher, je pèse 49kg mais j’avais l’impression d’ne peser 100 tellement j’avais du mal à me déplacer et je voyais double.
Quand on a été près de lui, il était tranquille. Très fatigué mais tranquille. On a parlé de son état (un tout petit peu, je ne suis pas allée plus loin que ce qu’il voulait dire), onlui a apporté un dessin de notre fils depresque 6 ans, jelui ai demandé s’il souffrait ou s’il était confortable, ce qu’on pouvait faire pour lui rendre leschoses plus agréables.
Ses pauvres lunettes étaient sur la table et ça me brise le coeur depenser qu’elles seront bientôt orphelines. Il peut unpeu regarder la télé, il ne peut paslire (les appareils le gênent mais il n’a pasla patience).Au bout de 40 minutes je voyais qu’il fermait de plus en plus souvent les yeux.
A chaque fois que j’ai été à l’hôpital, quand je n’allaispas bien , il y avait des fois où je préférais être seule pour dormir par exemple, je’ n’ aimais pasl’idée d’avoir quelqu’un près de moi parce que,eh bien, c’est intime.
Je lui ai demandé de nous dire franchement s’il souhaitait une présence à côté de lui auquel cas je serais restée pendant que mon mari partait travailler (j’avais apporté mon tricot et des journaux au casoù), ou s’il préférait des plages de visites et des plagesoù il peut se reposer seul.
Il m’a dit qu’il préférait desplages où il pouvait se reposer seul, qu’il se reposait mieux dans ce cas.La veille aussi aprèsla terrible nuit passée, c’était clair que dans la matinée notre présence lui pesait, il était énervé, nous envoyait promener, était impatient... alors jelecrois, ce n’est pas de la politesse. Mon beau-frère ira le voir en fin d’après midi. Ma soeur le soir.
J’ai le téléphone à côté de moi, je voudrais lui demander s’il veutme voir et que je revienne. J4ai peur de l’appeler. J4ai peur qu’il me réponde "non" pour ne pas medéranger et savoir qu’il est angoissé, j’ai peur qu’il me réponde non et que çaveuille dire oui...
J’ai aussi parlé au téléphone avec mon adorable patron que j’avais prévénu la nuit demardi pour lui dire que je ne pourrais pas venir travailler.
Il m’a téléphoné pour prendre des nouvelles et il m’a dit "passe ce temps précieux avec ton papa". Comment puis-je passer du temps précieux si je n’y suis pas ?
Que dois-je faire ? Retourner levoir et y resterquand même ? Mais est-ce du partage ? Est-ce que je fais mal ? Je me sens inutile à être revenue chez moi et le savoir seul à l’hôpital.

J’ai demandé aux médecins de nous prévenir à n’importe quel moment si ça se dégradait. Un médecin de jour m’a demande "vous voulez être avec lui quand il partira ?" Je lui ai dit oui. Elle m’a promis qu’ils le feraient.
Mais j’ai remarqué qu’elle m’a dit "quand il partira et pas s’il part". Comme si j’avais besoin d’une confirmation, alors que le chef de service m’a dit le plus franchement du monde qu’il allait mourir, j’ai failli lui dire "vous pensez qu’il va mourir ?"
Jeme suis abstenue parce que la réponse était évidente, mais pourquoi je n’arrive pas à y croire ?Je sais le déni et tout à cepoint là cela me parait de la stupidité. Je me fais répéter chaque information au moins 3 fois, je ne peux pas m’empecher de demander"alors ca va mieux ?" et je m’en veux tout de suite. DE touteslfaçons lesmédecins qui doivent être habitués reprécisent à chaque fois "c’est stable dansle très critique" etc.
Mon adorable patron est médecin aussi et sait toujours trouver les mots justes .Quand on a parlé il m’a demandé tous les signes, il a partagé avec moi la difficulté de la situation, il m’a dit "pense aussi à te ménager toi et à garder tes forces, prendsle temps de te reposer pour être là pour ton papa". Mais j’ai remarqué qu’il nem’a pasdit, par exemple, qu’il fallait espérer.
On m’a dit qu’il allait mourir et ondirait que ça ne rentre pas. En même temps, je ne suispas en déni, je veux dire je sais qu’il va mourir, là je suis seule chez moi et je pleure toutes les larmes demon corps et je redoute d’entendre le téléphone sonner.
Ma soeur, son mari, mon mari et moi ne pouvons pas non plus nous empêcher de nous demander "alors quand ?" tout en redoutant ce moment. Je ne veux pas que ce moment arrive mais en même temps puisqu’il doit arriver, jepréférerais que ça se passe dans lesmeilleures conditions possibles comme nous a dit le médecin.Maisquand ça se seraproduit, je sais queje n’en voudrais dem’être dit "alors quand ?
L’équipe soignante aussi nous répète à chaque fois que là ça a l’aird’aller mais ça ne va pas et ça peut se dégrader n’importe quand.
En même temps, que puis jeespérer ? Je sais que s’il va dans un autre service, si même ilrentrait chez lui, l’oedème aigu reviendrait.
J’espère que tout ce queje vous écris a un sens.

Je ne saispas si vouslirez cemessage avant quele pire ne se produise. J’ai presque envie de vous demander "il va mourir ?"
Et aussi sije fais bien.Y aller ? Ne pas y aller ? Que faire ? Est ce que j’ai un moyen d’éviter ça ? Si j’avais une lampe magique je demanderais au génie de le guérir, pourquoi je ne peux pas me rentreer la fichue idée dans la t^te ?
Je suis chez moi en train de boire du thé alors que mon père est en train de mourir à l’hôpital. Dois je allercontre sa volonté et y rester ? ESt ce que je fais bien dele laisser se reposer ? Est ceque je l’abandonne ?

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