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En réponse à :

L’agonie

, par Michel

Bonsoir, Françoise, et merci de ces précisions.

Vous avez fort bien fait de ne pas lui révéler son état. D’abord parce que si quelqu’un devait le faire, ce ne pouvait être que le médecin. Ensuite parce que la règle est très simple : on ne dit rien au malade qui ne pose pas de questions.

Il faut être stupide pour se figurer que les seuls malades qui ne pensent pas au cancer sont ceux qui en ont un. On peut discuter des mécanismes psychologiques qui sont en cause, mais le malade qui ne pose pas de questions a ses raisons pour se comporter ainsi, et il n’est pas bon d’aller contre ces raisons. Tout au plus doit-on laisser les portes ouvertes, et (mais c’est le rôle du médecin) suggérer que tout n’est pas simple. C’est très subtil.

Par contre on ne ment pas. Jamais. Et il arrive que le malade supporte très mal l’annonce qu’il a pourtant demandée. Mais s’il pose une question, s’il prend le risque de poser une question, alors il faut lui faire confiance, et accepter avec lui le risque de la réponse.

Mais la position des proches n’est pas celle du médecin. Il faut comprendre deux choses à propos de la "conspiration du silence" qui entoure souvent le malade :
- Elle le fait souffrir, car il sait beaucoup mieux qu’on ne pense de quoi il retourne, et qu’il n’a plus d’interlocuteur pour en parler.
- Mais elle ne le fait pas souffrir autant qu’on le pense, parce qu’en réalité personne n’est dupe de cette situation, et qu’elle porte en elle-même beaucoup d’amour. Et comme vous le notez, lui-même est entré dans la conspiration en vous cachant qu’il avait parfaitement compris ce qu’on lui disait.

Je ne sais pas ce que j’aurais dit si c’est à moi qu’il avait demandé s’il y avait encore de l’espoir. Je n’aurais certainement pas répondu "non" ; j’aurais plutôt répondu que les choses devenaient difficiles, que nous ne maîtrisions plus la situation, enfin quelque chose de cet ordre. Mais s’il avait insisté pour que je lui parle franc, je me serais peut-être senti acculé à lui répondre nettement.

Je ne sais pas davantage si le professeur a été brutal. Cela se peut, les professeurs sont rarement des praticiens. Ce que je sais c’est que, comme on le dit, il n’y a pas de bonne manière d’annoncer une mauvaise nouvelle, et que la brutalité qu’on nous reproche volontiers n’en est pas une : comment voulez-vous annoncer doucement à quelqu’un qu’il n’y a plus de solution pour lui ?

La fin que vous racontez me confirme l’intuition que j’ai eue à la lecture de votre premier message : tout s’est passé, puisqu’il fallait que cela se passe, le moins mal possible ; parce que vous étiez là, et que vous avez su faire tout ce qu’il fallait. Je souhaite que cette fierté vous soit un adoucissement.

Bien à vous,

M.C.

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